malformations et hypoplasies des membres inférieurs

les hypoplasies sont des pathologies congénitales rares qui ne touchent le plus souvent qu’un seul membre. Il s’agit d’une malformation régionale, « globale » du membre avec un problème à la fois de longueur et de structure du membre. Il existe 3 grandes classes.
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Sommaire

malformations et hypoplasies des membres inférieurs Description de la pathologie

les hypoplasies des membres

 

Même s’il s’agit d’une pathologie rare,  les hypoplasies sont la cause d’inégalité de longueur des membres inférieurs la plus fréquente chez l’enfant et l’adolescent en France et notamment dans notre région Les Pays de la Loire.  Il s’agit d’une malformation « régionale » du membre: il existe une inégalité de longueur et des anomalies associées.

Il existe 3 grands groupes d’hypoplasie détaillées plus loin: 

  • hypoplasie du péroné (hypoplasie fibulaire) fibulaire
  • hypoplasie fémorale
  • hypoplasie tibiale.

Les hypoplasies présentent certaines caractéristiques communes:

  • La malformation ne touche en général qu’un seul membre.
  • Ce sont des malformations de naissance, c’est à dire que l’enfant nait avec l’anomalie. Pour autant il n’y a pas de risque de transmission pour les futurs enfants du malade. L’origine de ces malformations n’ est pas clairement connue, probablement multifactorielle. Il existe une défaillance génétique à l’origine d’un défaut de développement du membre qui apparait très tôt chez l’embryon, lors des premières semaines de grossesse. Dans certains cas des facteurs environnementaux ont été suspectés, notamment dans certaines régions ou un taux plus élevé de malformations a été constaté avec même parfois une atteinte sur plusieurs membres ce qui n’est pas habituel.
  • Il existe des formes plus ou moins sévères allant d’une simple inégalité peu importante jusqu’à des inégalités sévères de plus de 20 cm avec des anomalies sérieuses des articulations (genou, cheville, hanche). A l’extrême le membre est totalement absent (on parle alors d’une aplasie).
  • Dans ce groupe de pathologie, il n’y a pas uniquement un problème de longueur, il existe souvent des anomalies globales du membres (sur un plan musculaire, ligamentaire, articulaire ou autre…). Ainsi on parle de malformation « régionale du membre. Très souvent le pied est malformé. Il faudra donc traiter le problème de longueur et les malformations associées. Dans ces pathologies l’inégalité de longueur est variable selon les cas: elle peut être minime, 3 ou 4 centimètres (et en général les anomalies associées sont peu importantes)  modérée (moins de 10 cm) ou majeure, parfois plus de 20 centimètres, et dans ce cas les anomalies associées peuvent être sévères.
  • point important caractérisant les hypoplasies: l’inégalité de longueur constatée à la naissance évolue avec la croissance de telle façon que le pourcentage d’inégalité entre les 2 membres reste constant tout au long de la croissance. Ainsi on regarde à la naissance ou se projette le talon du côté atteint qui est plus court sur le membre sain. Ce niveau va rester constant pendant la croissance. Par exemple si le talon arrive à hauteur de mi jambe du côté sain chez un bébé cela représente une inégalité d’environ 7-8 cm. A lâge adulte, en gardant cette même projection talon- mi jambe, on se retrouve avec une inégalité de 20 centimètres.

 

Les photos ci dessous montrent des cas assez sévères, ce n’est la situation la plus fréquente mais cela permet de mieux « comprendre » les anomalies et malformations.

hypoplasie fibulaire (péroné):

 

Il s’agit de la forme la plus fréquente d’hypoplasie. Elle est également nommée « ectromélie longitudinale externe ».

l’inégalité de longueur siège surtout au niveau de la jambe mais elle peut aussi concerner un peu la cuisse.

L’inégalité peut être importante et dépasser en fin de croissance 15 centimètres. Elle est le plus souvent entre 5 et 10 cm.

La fibula (péroné) est plus ou moins absente, et c’est son aspect qui permet de classer les hypoplasies fibulaires en 3 types. En soit ce n’est pas gênant que le péroné soit absent, cela n’empêche pas la marche ni même la course à pied ou tout autre sport. Par contre, Il existe souvent d’autres anomalies:

  • anomalies osseuses entre les os du pied (synostoses) ce qui peut retentir sur les mobilités du pied.
  • Il peut manquer des orteils latéraux. S’il en manque un ou deux ce n’est pas grave. 3 orteils suffisent pour bien marcher de façon stable. Si par contre il en manque 3 ou plus, cela remet en question la fonctionnalité du pied.
  • Dans les formes sévères le pied peut être luxé (déboité) vers l’extérieur. Cela obligera, avnt d’envisager tout allongement, à réaliser une intervention pour repositionner le pied sous la cheville.
  • Il peut également manquer des ligaments dans le genou ce qui n’est en général pas source d’instabilité. On parle d’agénésie ligamentaire. Cela peut rendre compliqué et dangereux la réalisation d’un allongement osseux.

 

 

hypoplasie fémorale

 

L’ inégalité de longueur siège surtout au fémur (il existe souvent aussi une petite différence de longueur entre les 2 tibias). Dans la majorité des cas les malformations associées sont minimes, avec comme anomalie la plus fréquente une jambe un peu déformée vers l’extérieur (valgus du genou en raison d’une hypoplasie du condyle fémoral latéral).

Dans les formes sévères, la hanche peut être malformative ainsi que l’appareil extenseur (muscle quadriceps de la cuisse) du genou, ce qui fait le pronostic fonctionnel ultérieur. A l’extrême le fémur est absent avec le genou à hauteur de la hanche (phocomélie).

 

 

 

Hypoplasie tibiale

L’inégalité de longueur siège surtout à la jambe. En effet les cuisses sont en général identiques. Il existe 4 formes différentes en fonction de l’aspect du tibia qui  est toujours malformé. C’est surtout au niveau de la cheville, qui est parfois absente, que l’on trouve le plus d’anomalies. Le pied est en général déformé vers l’intérieur lorsque la cheville est malformative. Pour autant le fait d’avoir une cheville même absente ne veut pas dire que la marche ne sera pas possible.

La malformation du tibia peut remonter jusqu’au genou avec à l’extrême un tibia totalement absent. Le gros orteil est souvent anormal.

L’ anomalie articulaire de la cheville se voit souvent assez bien lors de la réalisation de l’échographie du premier trimestre de grossesse.

 

malformations et hypoplasies des membres inférieurs Diagnostic clinique & examen

diagnostic

Le diagnostic est souvent fait en « anténatal » (diagnostic avant la naissance) au moment des échographies de contrôle réalisées au premier ou au second trimestre. Une consultation prénatale éclairée auprès d’un chirurgien spécialisé dans les malformations des membres est nécessaire pour expliquer la malformation et sa prise en charge aux futurs parents qui se posent naturellement beaucoup de questions.

Il faut bien comprendre pour autant que l’échographie ne peut faire un diagnostic très précis de la malformation. Elle renseigne surtout sur la différence de longueur entre les 2 membres, sur la présence de certaines anomalies associées telles que le nombre d’orteils présents, la position du pied. D’autres anomalies sont plus difficiles à mettre en évidence raison pour laquelle cette consultation anténatale ne peut donner que des grandes orientations de traitement sans pouvoir être parfaitement précis sur le cas particulier de l’enfant à naître. Cela permet de rassurer sur un certains nombre de points: notamment que dans la très grande majorité des cas l’anomalie ne touche qu’un membre et ne touche pas le cerveau ni les organes thoracique ou abdominaux. Cela permet également d’expliquer que même avec une malformation sévère il est possible d’avoir une vie sociale professionnelle et même sportive tout à fait épanouissante, même s’il n’y a pas de chirurgie possible et que l’enfant sera appareillé avec une orthoprothèse toute sa vie. Cette consultation permet enfin, si les futurs parents le souhaitent, de discuter  de comment on peut corriger une malformation articulaire, de comment on fait un allongement osseux….

L’examen à la naissance sera finalement plus déterminant sur le pronostic et les possibilités de traitement. On regardera l’inégalité de longueur, le niveau ou elle prédomine, les anomalies associées, et surtout les mobilités spontanés du membre du bébé.

suivi

La première consultation orthopédique spécialisée est organisée dans les premières semaines de vie du nourrisson. Elle permet d’expliquer la malformation et les grandes lignes du suivi et du programme thérapeutique.

Une seconde consultation est en général programmée autour de l’acquisition de la marche, pour adapter une éventuelle compensation. Il faut bien comprendre que même si l’inégalité est sévère, cela ne va pas empêcher l’acquisition de la marche. 

Ensuite, pendant la croissance, une consultation tous les ans à tous les 2 ans est recommandée pour suivre l’évolution de l’inégalité, en fonction de la situation spécifique de l’enfant. Lorsque l’inégalité dépasse 2-3 centimètres on commence à compenser l’inégalité par une semelle. Plus l’inégalité augmente plus il faut compenser en ajoutant une semelle sous la chaussure ou en utilisant une orthoprothèse pour les formes sévères. 

malformations et hypoplasies des membres inférieurs Traitements

Il y a 2 grandes « voies » de traitement en fonction de la sévérité de la malformation que présente l’enfant:

  • PROGRAMME D’EGALISATION: l’objectif est d’avoir un membre qui fonctionne bien tout seul sans appareillage, cela nécessite souvent plusieurs interventions en fonction de la sévérité de la malformation (allongements osseux +/- correction de malformation).
  • TRAITEMENT ORTHOPROTHETIQUE: pas de chirurgie d’égalisation envisagée. Une chirurgie peut s’avérer nécessaire mais dans ce cas uniquement pour faciliter un appareillage. C’est la prise en charge à proposer si la malformation est trop sévère.

 

le plus important est de savoir orienter l’enfant et la famille rapidement (première année de vie) dans la bonne voie.

 

 

 programme d’égalisation

 

Un programme d’égalisation consiste à faire un ou le plus souvent plusieurs allongements osseux progressifs pour avoir les 2 membres de même longueur (à 2 cm près).

Pour envisager un programme d’égalisation il faut un certain nombres de prérequis:

  • Que l’inégalité de longueur prévue en fin de croissance n’excède pas 20 cm, en sachant qu’avec les nouveaux systèmes d’allongements intraosseux (clou Precice) cette limite va probablement évoluer.
  • que le pied ait au moins 3 orteils, minimum pour avoir un appui stable.
  • Que le pied soit à plat au sol ou puisse être mis à plat au sol au moyen d’une intervention chirurgicale si nécessaire. 
  • Que le genou soit suffisamment stable. Cela ne pose pas de soucis pour marcher courir et faire du sport si l’enfant nait sans ligaments croisés (rien à voir avec une rupture traumatique du LCA) et n’empêchera pas la réalisation d’allongements. En cas d’absence totale de ligaments (ligaments croisés et ligaments périphériques du genou) et notamment si le muscle de la cuisse (quadriceps) ne fonctionne pas bien, seule une orthoprothèse permettra d’avoir une marche stable. Dans ce cas, on ne fera pas d’allongement osseux car l’enfant de toute façon ne pourra jamais se passer de cette orthoprothèse.
  • Que la hanche soit stable (éventuellement au moyen d’une opération) si nécessaire).

 

Ainsi, au total, un programme d’égalisation est basé sur un ou des allongements mais nécessitera aussi souvent d’autres interventions pour avoir un membre fonctionnel. Cela implique parfois de nombreuses chirurgie étalées pendant la croissance.

 

 

 

Pendant la croissance, une consultation tous les ans à tous les 2 ans est recommandée pour suivre l’évolution de l’inégalité. Lorsque l’inégalité dépasse 2-3 centimètres on commence à compenser l’inégalité par une semelle. Plus l’inégalité augmente plus il faut compenser en ajoutant une semelle sous la chaussure ou en utilisant une orthoprothèse pour les formes sévères. On ne compense pas toute l’inégalité, surtout lorsqu’elle est importante. L’objectif de la compensation pendant la croissance  est uniquement de faciliter la marche et les activités.  Ainsi même si l’inégalité est importante on peut laisser l’enfant marcher sans sa compensation si c’est ce qu’il préfère, notamment l’été lorsqu’ils veulent être pieds nus. Il n’y a pas de risque de scoliose ou même d’aggraver les risques d’arthrose sur ces années de croissance ou le corps de l’enfant présente des capacités adaptatives assez incroyables. 

Une chirurgie d’allongement osseux permet d’allonger en 1 fois jusqu’à 8 centimètres si nécessaire. Dans certains cas la différence de longueur entre les 2 jambes est très importantes, plus de 10 voir plus de 15 centimètres. Dans ce cas il faudra envisager plusieurs allongements. Il s’agit le plus souvent « d’hypoplasies » discutées plus haut (malformation de naissance) pour lesquelles il existe souvent des malformations (pied et cheville surtout, mais aussi parfois genou ou hanche) lorsque l’inégalité de longueur est importante. Ces malformations associées nécessitent aussi souvent une intervention, pour remettre le pied en bonne position sous la jambe par exemple. Le fait de devoir envisager plusieurs interventions étalées pendant la croissance (corriger une malformation et faire plusieurs allongements) s’appelle un programme d’égalisation.

Ceci est expliqué plusieurs fois à la famille, dès la naissance de l’enfant.  Ainsi par exemple, pour un enfant qui nait avec une hypoplasie de la jambe et qui a une inégalité de longueur estimée autour de 15 cm en fin de croissance et qui a un pied mal positionné on envisagera:

  • vers l’âge de 2 ans une première intervention pour repositionner sous la cheville correctement,
  • un premier allongement par clou Precice vers l’âge de 7-8 ans. Avant ce premier allongement l’enfant développe une marche tout a fait efficace et l’inégalité progressive est compensée partiellement par une semelle collée sous la chaussure.
  • Un second allongement avec le même clou laissé en place la première fois vers l’âge de 10-12 ans.
  • Un troisième allongement en fin de croissance pour parfaitement égaliser les 2 membres.
  • Il peut aussi être nécessaire de freiner la croissance de l’autre jambe (épiphysiodèse) de 2 ou 3 cm pour ne pas avaoir à réaliser un allongement trop important de l’autre côté. En effet plus on fait d’allongements, plus les risques de complication augmentent.